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ENSEMBLE POUR NOS COMMUNES
ENSEMBLE POUR NOS COMMUNES
5 février 2005

Directive Bolkestein

Directive Services

Intervention de Denis Badré,

le 15 mars au Sénat

M. BADRÉ, rapporteur pour avis de la Délégation parlementaire pour l'Union européenne. – Aujourd'hui, nous innovons : pour la première fois, la délégation aux affaires européennes intervient pour avis à côté d'une commission saisie au fond. Cela crée une exigence et confère un honneur à celui qui a cette responsabilité aujourd'hui. J'en suis fier et impressionné mais je suis rassuré, après le parfait rapport de M. Bizet, dont le projet de résolution est globalement satisfaisant.

Nous avons veillé à ce que la délégation intervienne dans ce débat avec pour préoccupation la construction européenne. Dans l'actuelle conjoncture passionnelle, nous devons veiller à ce que ce débat sur la proposition de directive et celui sur le traité soient clairement distingués.

Conformément à l'article 88-4 de la Constitution, nous ferons part au gouvernement de notre lecture de la directive Bolkestein, afin de lui donner des arguments plus solides au plan européen, afin aussi de désarmer les inquiétudes infondées et prendre en considération celles qui sont justifiées. L'Europe n'est pas une abstraction bruxelloise ! C'est la Commission dont les pouvoirs d'initiative vont croissants, le Conseil, le Parlement européen ; c'est aussi l'ensemble des Européens qui s'expriment par leurs Parlements.

La délégation a assumé son rôle de vigie en se saisissant de cette affaire. De façon originale, c'est un groupe de travail pluriel – Mme Hermange, M. Lagauche, M. Bret et moi-même – et non un rapporteur isolé qui a approfondi la question. La méthode s'est révélée fort enrichissante et notre rapport en est plus solide. Je rends ici hommage à mes trois collègues et le rapporteur que je suis parle sous leur contrôle et en complicité avec eux – chacun conservant son point de vue.

Nous avons travaillé dans des délais très courts – non dans la précipitation, mais rapidement.

Le marché unique des services est bon pour la construction européenne et bon pour la France compte tenu de sa place en Europe dans ce secteur économique. Encore faut-il que la directive soit bonne…

Nous sommes dans une période clé de la construction européenne ; nous voulons construire l'Europe des Européens. Le texte doit prendre en compte la nécessaire réussite de l'élargissement à vingt-cinq – il n'est pas achevé ! – et la relance du processus de Lisbonne.

L'Europe n'existera que si nous savons renforcer notre compétitivité face aux États- Unis et conduire une politique d'aide au développement digne de ce nom.

S'agissant de la directive, je veux d'abord évoquer la manière.

On ne construit pas l'Europe à reculons ni en se défendant de la construire ; l'Europe est notre avenir et celui-ci doit être regardé en face ! On ne saurait aborder en bloc dans une directive des secteurs que l'on n'a pas su comment traiter.

C'est désobligeant pour les Européens concernés et c'est pousser au crime en incitant les représentants de ces activités à tout faire pour éviter de monter dans la voiture-balai – pour s'exonérer des contraintes européennes. Ce n'est pas l'Europe pour laquelle je milite… presque depuis ma naissance. (Sourires.)

Ne traitons pas les gens par le mépris, proposons leur une démarche positive – les Européens ont besoin de savoir où on leur propose d'aller. Les inquiétudes et les appréhensions sont provoquées par l'absence d'étude d'impact. La commission devrait les fournir en toute occasion.

En outre, nous ne pourrons travailler ensemble qu'à partir de définitions partagées : « pays d'origine », « services », « services publics », « services d'intérêt général » peuvent donner lieu à des lectures différentes… Il faut un texte clair pour ne pas avancer dans le brouillard. Du point de vue de son contenu, la directive n'est pas mauvaise, globalement, puisqu'elle simplifie et consolide des dispositions déjà existantes. Mais n'oublions pas que l'Europe doit partager une exigence qui est de viser l'excellence. C'est précisément ce que bafoue la notion de principe de pays d'origine. Nous ne voulons pas d'un alignement sur le moins disant, qui serait une régression pour tous les pays qui ont déjà construit une politique sociale, environnementale. L'Europe que nous voulons n'est pas celle qui nierait l'effort, accompli : on instillerait un poison mortel en dressant les États membres les uns contre les autres. La course au moins-disant donnerait une détestable image de l'Europe dans le monde ! L'Europe, c'est la démocratie, la défense des droits de l'homme, mais aussi une exigence sociale et écologique. N'en rabattons pas par rapport à nos principes et nos ambitions !

On entend dire que le principe du pays d'origine est fondamentalement européen parce qu'il respecte la diversité. Mais si les pays ont décidé de s'unir, c'est pour mettre en commun un certain nombre de règles ! L'arrêt Cassis de Dijon protège un produit, élaboré localement : la diversité des terroirs est une richesse à préserver. Mais les services, eux, sont rendus dans le pays client, il y a là une différence essentielle, et M. Bizet a détaillé les implications pénales de l'application en ce domaine du principe du pays d'origine.

La reconnaissance mutuelle peut-elle être assimilée à ce principe du pays d'origine ? C'est une façon de valoriser une différence positive : la justice est rendue différemment en France et en Grande-Bretagne. On ne demande pas à l'une ou à l'autre de changer, on recherche une harmonisation respectueuse des traditions et spécificités de chacune. Il faut rechercher ce qui construit le mieux l'Europe, riche de sa diversité, mais dans l'Union, par une démarche commune, voire unique dans certains domaines. C'est la reconnaissance mutuelle des efforts politiques de tous ceux qui se seront engagés dans l'aventure pour qu'elle réussisse ! Faire prévaloir l'intérêt commun sur les intérêts particuliers, tel est le défi à relever.

Il nous faut valoriser ce qui fait la richesse de la France, son apport à l'Union, mais aussi accepter le regard des autres sur notre système.

Le service public à la française ne doit pas demeurer une exception française : si dans un domaine il est repris par l'Union européenne, fort bien ; mais, dans d'autres domaines, le regard de l'autre peut nous amener à réfléchir sur nous-mêmes. C'est le sens de la correction fraternelle. Je nous invite donc à poursuivre dans la voie d'une construction européenne qui respecte notre diversité et nos richesses, unis autour des valeurs qui nous sont essentielles : la paix et la démocratie. (Applaudissements au centre et à droite.)

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